Cuisiner durable et bio entre voisins à Aix-en-Provence
Au Théâtre du Bois de l’Aune à Aix-en-Provence, un nouveau restaurant du réseau associatif national Les Petites Cantines a ouvert officiellement ses portes le 4 novembre. Un lieu qui vise à tisser des liens entre voisins par la cuisine d’aliments de qualité.
Il est 9h30 et le restaurant accueille déjà du monde. Ce n’est pas pour déguster le menu du jour mais bien pour préparer les plats qui régaleront les convives du midi. Florence, Julie et Danielle sont déjà assises autour de la table avec un bon café. Elles seront ensuite rejointes par quatre autres bénévoles. Chacune se présente et raconte comment elle a connu le réseau des Petites Cantines. Une fois le tour de table terminé, Élodie, coresponsable de l’établissement d’Aix-en-Provence, leur présente le déroulé de la matinée.
La cuisinière de formation leur rappelle d’abord le concept des Petites Cantines. Il est simple : un restaurant solidaire destiné à recréer du lien dans un quartier afin de sortir les habitants de leur solitude en cuisinant à plusieurs des produits de qualité.
Pour ce faire, les personnes adhèrent à l’association. En tant que bénévoles, elles peuvent venir cuisiner le matin ou simplement manger le midi, selon les disponibilités de chacun. « Avec ce système on compte entre 200 et 300 adhérents. De bénévoles réguliers, on en a une vingtaine », précise Élodie. Le prix du repas est libre. « On fait connaître aux personnes qui viennent manger le prix d’équilibre, qui est de 10 euros, mais chacun donne ce qu’il peut », indique-t-elle.
Une fois les explications faites et les rôles définis, la brigade enfile un tablier bleu ou gris à l’effigie des Petites Cantines et un bandana en guise de charlotte. Il est déjà 10h. Avant 12h30, le repas doit être prêt pour la vingtaine de personnes qui vient déjeuner.
En cuisine, Daphné, une étudiante en licence d’anthropologie à Aix qui réalise une enquête de terrain, et Élodie montrent aux cuistots du jour l’organisation du lieu. Elles leur indiquent notamment l’emplacement des légumes, des épices, des ustensiles et leur rappellent les règles d’hygiène. Une fois les mains lavées, chacune se met à son poste et va chercher les ingrédients indiqués sur la recette.
Aujourd’hui, elles doivent préparer un véritable repas de saison avec : en entrée un velouté de champignons, en plat du butternut au gorgonzola et aux lentilles et en dessert un crumble aux pommes.
Des menus entièrement végétariens et de qualité
À chaque jour son menu. Les plats proposés changent quotidiennement, selon le modèle défini par le réseau national. Ils sont soit élaborés par Élodie et Céline, coresponsable elle aussi, ou par deux bénévoles de l’association. Une boîte à idées permet également aux participants de proposer leurs recettes.
L’établissement d’Aix-en-Provence ne sert que des repas végétariens. « Ce choix s’explique aussi bien par la volonté de s’inscrire dans une alimentation durable, que dans celle de correspondre à tout le monde. Le quartier de Jas-de-Bouffan, regroupe plusieurs religions », poursuit Élodie.
Outre le fait qu’il n’y ait pas de viande, les produits sont majoritairement bio afin de proposer aux clients une alimentation durable. « Le but est de créer du lien mais le deuxième pilier est de permettre à tout le monde de manger quelque chose de qualité et sain. Toute la phase écologique nous tient à cœur. C’est pour ça qu’on cuisine des produits de saison », détaille Élodie.
« On est dans une logique globale. On n’achète pas des produits premiers prix, qui ne sont pas de saison, cultivés sous serre. On fait ce qu’on peut au maximum pour être cohérent à ce propos », ajoute-t-elle.

Julie et Florence ont préparé ensemble l’entrée du jour : un velouté de champignons © Les Petites Cantines d’Aix-en-Provence
Un choix passant aussi par les fournisseurs
Pour respecter cet engagement, le restaurant achète ses ingrédients auprès de deux fournisseurs. « Pour les fruits et légumes on travaille avec La Cantina à Marseille. Ils font le tour des agriculteurs et ne travaillent qu’avec des entreprises sociales et solidaires ou avec des associations. Je n’ai pas trouvé de fournisseur en épicerie dans le Sud qui ait un rapport qualité/prix qui soit viable. On fait comme on peut », poursuit-elle.
La co-responsable regrette de ne pas pouvoir s’approvisionner directement auprès des agriculteurs. Une logistique trop compliquée à mettre en place pour le nouveau restaurant. « Puisque nous ne sommes que deux à tout gérer, j’essaye de diminuer au maximum la quantité de fournisseurs. On s’approvisionne aussi auprès d’Auchan car il est à côté. On prend la meilleure qualité possible dans leur rayon et un bénévole va récupérer le drive. J’aurais aimé que ce soit autrement mais pour l’instant c’est la réalité ».
Sensibiliser le public à une alimentation durable
Même si l’établissement ne sensibilise pas explicitement ses bénévoles à consommer plus durablement, les participants prennent conscience de cet axe lorsqu’ils contribuent à la préparation du repas. « Je ne suis pas végétarienne mais depuis que je n’ai plus les enfants à la maison, j’ai tendance à moins cuisiner de viande. Donc ça me fait découvrir de nouvelles choses. Je vois qu’ils réutilisent des produits qu’il leur reste d’anciennes recettes. Je trouve ça plus respectueux », se réjouit Florence qui vient de finir la préparation du velouté de champignons.
« Heureusement qu’il y a des associations comme celle-ci qui mettent ce type de cuisine en place. Ça permet aux gens qui viennent manger de se poser la question sur leur consommation. Nous aussi ça nous sensibilise », affirme Julie, future maman passionnée de cuisine et adepte de recettes à tester.
Un avis partagé par Daphné qui tient cette semaine le rôle de maîtresse de maison : « On sensibilise de manière inconsciente, ce n’est pas moralisateur. On cuisine bio, de bons produits et ça donne envie. Ça permet aux gens de se dire que si on enlève la viande, on peut mettre plus de budget pour manger bio ».
Une manière douce de sensibiliser un public qui n’est pas forcément habitué à ce mode de consommation. « On est dans un quartier prioritaire, ce n’est pas leur priorité justement d’aller chez le maraîcher du coin. Je ne pense pas que l’on devrait dire à des gens qu’ils devraient faire plus d’efforts pour manger sain. On se rend compte qu’on peut se concentrer sur cela seulement si on a le temps, l’énergie », affirme Élodie.
Aujourd’hui, 15 Petites Cantines sont ouvertes au niveau national et autant sont en cours de montage, dont une à Marseille et une à Beausoleil.
Marianne Courbon
10 novembre 2025
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