14 novembre 2025

Marcoville fait briller les déchets à la cathédrale de la Major

Jusqu’au 8 mars 2026, la cathédrale de la Major, située dans le 2ᵉ arrondissement de Marseille, se transforme en musée à l’occasion de l’exposition Lumières Célestes. Le sculpteur français Marcoville y expose des œuvres monumentales réalisées en verre recyclé. Une exposition gratuite qui mêle art, lumière et conscience écologique.

Sous les voûtes de la cathédrale de la Major, des centaines d’anges en verre sablé, des arbres transparents de cinq mètres de haut, des milliers de poissons suspendus à plusieurs dizaines de mètres, semblent flotter dans la nef. Ce décor monumental n’a pourtant rien de clinquant : il est né de matériaux de récupération.

À 85 ans, Marcoville mène un travail autour du recyclage et du détournement de matériaux, habituellement délaissés. L’artiste récolte du verre cassé, des vitres brisées, des miroirs abîmés, pour leur offrir une seconde vie. « Je pourrais acheter du verre neuf, mais j’aime chercher les choses fichues et les remettre dans le circuit », confie-t-il. Son geste à la fois poétique et militant redonne de la valeur à ce que l’on croit perdu et sans valeur.

L’art de sublimer le déchet

Marcoville à la Major 2 © Amélien Gay

Dans Lumières célestes, tout part du verre recyclé. Les fragments se transforment en matière de lumière : polis, sablés, assemblés, ils reflètent et diffusent la clarté naturelle de l’une des plus grandes cathédrales de France.

Mais au-delà de la beauté, Marcoville adresse un message écologique fort. Dans une société où tout se jette, il prouve que la création peut s’appuyer sur l’existant. Chaque sculpture raconte une renaissance, une réparation, un refus du gaspillage. Ici, l’art devient un acte durable, une façon de transformer la matière sans la détruire, en lui donnant une seconde vie, en l’érigeant en œuvre. À sa manière, Marcoville fait ce que Baudelaire faisait avec les mots : il transforme ce que l’on juge laid ou insignifiant en objet d’art.

« Et j’ai vu quelquefois ce que l’homme a cru voir :
Au milieu des odeurs, des chairs pourrissantes,
Une forme étrange et terrible s’élever,
Comme un fantôme magnifique et triomphant. »

Extrait du poème Une Charogne issu du recueil Les Fleurs du Mal  de Charles Baudelaire

« Un véritable voyage féérique »

Pour les visiteurs, la surprise est totale. « C’était très surprenant de voir ces œuvres gigantesques dans une cathédrale », raconte Agathe, 19 ans, étudiante à Toulouse. « Les œuvres sont très variées et poétiques. Marcoville a beaucoup utilisé le verre, ce qui crée un jeu de lumière fantastique avec les vitraux. C’est un véritable voyage féérique. »

Elle salue également la démarche écologique de l’artiste et avoue comme beaucoup ne pas avoir deviné que les œuvres étaient faites à partir de matériaux de récupération : « Les déchets sont retravaillés, le verre paraît plus brillant que jamais. Cette démarche est remarquable : elle donne une seconde vie aux objets, les sublime plutôt que de les laisser à l’abandon. C’est poétique que des choses rebutantes deviennent admirées. »

Amélien Gay
13 novembre 2025

Marcoville à la Major 3 © Amélien Gay

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