4 juillet 2025

Pédaler à l’aventure

Un guide pour Oser le voyage à vélo

Dans la grande famille des guides de voyage, le petit dernier des éditions Ulysse est bienvenu, pour tous ceux qui sont tentés par le cyclotourisme mais hésitent encore à se lancer. Léger, synthétique, il est cependant très complet et tient les promesses de son titre : Oser le voyage à vélo. Avec le gros avantage d’aborder la dimension émotionnelle de l’aventure. Car il n’est pas évident d’affronter ses appréhensions, quand on n’a jamais tenté l’expérience, surtout en solo. Pour les femmes, en particulier, habituées à se méfier des comportements masculins.

Déclic psychologique

Mais cela tombe bien, l’auteure est une femme, et Laura Pedebas (alias la Cyclonomade) sait trouver les bons mots, sans minimiser le fait qu’encore aujourd’hui, voyager seule n’est pas une évidence. Sa conclusion, pour avoir elle-même franchi le pas et pédalé des milliers de kilomètres : on convainc davantage par l’exemple. Or, les exemples ne manquent pas, depuis la pionnière Annie Londonderry, qui en 1894-1895 a « bouclé son tour du monde sur un vélo lourd, sans vitesses, en portant le fameux pantalon large bloomer pour simuler une jupe ». Prendre la route, écrit-elle, nécessite avant tout… de résister aux inquiétudes et commentaires décourageants de son entourage.

Le danger n’est pas inexistant, bien-sûr, mais il réside surtout dans le fait de partager les voies de circulation avec les gros véhicules à moteur. Il faut donc, préconise Laura Pedebas, demeurer alerte, arborer couleurs vives, lumières et bandes réfléchissantes pour être visible, et privilégier des routes moins fréquentées, avec un bas-côté, quand il n’y a pas de pistes dédiées aux deux roues. Le vélo est, souligne-t-elle, un très bon moyen de se réconcilier avec le genre humain. Les cyclistes sont très souvent prêts à échanger des conseils, donner des coups de main, s’entraider. Cela réconforte quand le moral vacille, et invite à soi-même s’ouvrir à l’autre. Rencontrer autrui est plus facile en selle que quand tout le monde est enfermé dans l’habitacle d’une voiture ou plongé le nez dans un écran…

Les immenses atouts de la bicyclette

Si pédaler améliore la santé physique et mentale, c’est aussi un bon moyen de ralentir nos vies modernes effrénées. Sortir sans voiture, passer du temps dans la nature, faire de l’exercice physique… Quand on avale les kilomètres grâce à ses propres muscles, on développe le sens de l’orientation, gagne en autonomie et estime de soi. Il va sans dire que le vélo est un moyen de transport très écologique, avec un bilan carbone bas, une robustesse et une réparabilité hautes. Il y a donc une vraie dimension politique à ce choix, outre le fait d’encourager l’émancipation féminine évoqué plus haut.

C’est aussi une excellente école de la vie : tous les aléas du transport à bicyclette apprennent à improviser, respecter ses limites physiques, lâcher prise. Avant de partir, il est bon de s’exercer à changer une roue (il existe dans de nombreux endroits des maisons du vélo, avec des permanences d’entraide gratuite, parfois non mixtes pour plus de tranquillité), s’équiper d’une trousse à outils, bien choisir son matériel et ses vêtements pour qu’ils soient les plus légers, compacts et efficaces possibles. Le guide regorge de bons conseils, comme le fait d’enrouler sa gourde dans un linge mouillé en cas de grosse chaleur, pour la maintenir fraîche. Le plus important : prévoir de l’eau en quantité, manger des légumes et fruits qui en contiennent beaucoup comme le concombre ou la pastèque. Établir son itinéraire s’apprend aussi : un cycliste non sportif roule à une vitesse moyenne de 12 km/heure, nous dit Laura Pedebas, et peut parcourir de 50 à 80 km par jour. Il faut penser à se reposer, faire des étirements après l’effort, consulter la météo et le relief avant de partir.

Tous en selle

L’un des avantages du cyclotourisme, et non le moindre, est son coût relativement bas : pas d’essence ou de péage, des campings plutôt que des hôtels… Le prix du guide peut donc faire tiquer : près de 23 €, n’est pas rien quand on a un budget serré. Mais il peut s’emprunter à la bibliothèque, ou se prêter, une fois lu, quand on a sauté le pas d’oser le voyage à vélo, pour convaincre ses proches de s’y mettre.

Car si pédaler tout seul, sans compromis, est un régal, tout ceci peut se pratiquer avec des inconnus, en amoureux, entre amis, en famille. Les enfants gagnent eux aussi énormément à partir ainsi en voyage. « Il faut que les jeunes se dépensent, s’activent et passent du temps dehors, rappelle l’auteure. Les études scientifiques abondent en ce sens, et démontrent aussi que notre jeunesse ne bouge plus assez. » Circuler à vélo est propice à apprécier la beauté des paysages. Célébrer les victoires en groupe, quand même le plus jeune ou le moins sportif a franchi le col difficile, est une grande joie.

Gaëlle Cloarec
3 juillet 2025

Oser le voyage à vélo
Laura Pedebas
Guide Ulysse, 22,99 €

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